De Porvenir à Ushuaïa, 480 km
Du 25 mars au 4 avril
Itinéraire
La Terre de Feu
La Terre de Feu (Tierra del Fuego) est le nom donné à l’archipel qui se trouve à l’extrême sud du continent sud-américain. Divisé entre l’Argentine et le Chili, il est composé d’une île principale, la grande île de la Terre de Feu, communément appelée « Terre de Feu » et d’une grande quantité d’îles plus petites.
Les premiers habitants (les fuégiens), des autochtones au mode de vie de chasseurs ou de pêcheurs, ont disparu de même que leur culture, du fait de génocides, de maladies importées par les colons, de l’alcoolisme, de l’appropriation de leurs terres et du métissage.
C’est d’ailleurs les feux allumés par ceux-ci, et qui étaient visibles depuis l’océan, qui donnèrent son nom à l’archipel. Les noms de Terre des Fumées et Terre des Feux furent choisis par Fernand de Magellan, capitaine de la première expédition européenne à atteindre les îles et à traverser le détroit qui porte son nom, en 1520.
C’est à partir des années 1980 que le tourisme a fortement progressé, grâce notamment à la réputation de la région pour la pêche sportive dans les rivières des estancias et à l’image de « bout du monde » dont bénéficie la Terre de Feu. De « la ville la plus australe », Ushuaïa, partent de nombreux bateaux de croisières vers le cap Horn, vers l’Antarctique.
C’est une région que nous avons beaucoup appréciée. Nous avions entendu qu’il n’y avait rien à voir, que tout était plat et désert ! Et bien, à vélo, ce n’est pas tout plat, et même si le nombre d’habitants au kilomètre carré est très faible, les villes de Porvenir, de Rio Grande, d’Ushuaïa et les villages de Tolhuin et Puerto William concentrent quand même un grand nombre d’activités.
Porvenir
Créée en 1894 au fond de la baie Chilota, par des colons croates, chercheurs d’or, elle est considérée comme la capitale de la Terre de Feu chilienne. Elle fut construite à la suite d’une ruée vers l’or vers la fin du XIXème siècle.
Elle compte environ 6 000 habitants. Aujourd’hui la pêche, l’élevage et dans une moindre mesure le tourisme constituent les principaux secteurs économiques.
On y trouve des restaurants, des hôtels, dont beaucoup étaient fermés lors de notre passage fin mars. D’ailleurs, nous avons vu peu de touristes, le village paraît endormi, il n’y a pas beaucoup d’animation !!!
Par ailleurs, on y trouve aussi un établissement de santé, des établissements scolaires et un aérodrome.
De Porvenir au Parque Pingüino Rey
Nous quittons Porvenir sous le soleil par une montée douce sur une route bétonnée. Mais au bout de 12 km, c’est le ripio qui prend le relais, pas trop mauvais pour une fois.
La piste longe la Bahia Inutil alternant descentes et montées, cabanes de pêcheurs et de loin en loin des estancias. Pas d’autres présences ici si ce n’est les guanacos et les renards, et quelques troupeaux de moutons.
La lumière, les couleurs, l’océan, c’est beau ! Laure dit même que cela ressemble à la Bretagne !
Et puis la route remonte un peu et nous nous retrouvons sur une espèce de plateau, et là, c’est… plat ! C’est la pampa et rien pour arrêter le vent que nous avons heureusement dans le dos !
La route est bordée de loin en loin d’abris pour cycliste très bien conçus. Malheureusement, les deux que nous voyons aujourd’hui sont dans un triste état : fenêtres, portes, échelle pour monter sur la mezzanine, tout a disparu ou est brisé sans parler des souillures ! Lamentable !
Nous qui pensions bénéficier d’un abri si bien pensé pour les cyclistes, sommes obligés de planter la tente mais rien pour nous protéger du vent qui souffle heureusement assez modérément.
Au matin, il ne fait pas bien chaud : 0° C sous la tente qui est recouverte de glace ! Mais nous n’avons pas eu froid cette nuit, merci les duvets !
Le soleil éclaire la pampa, c’est beau ! Tout le long de la piste, les guanacos nous impressionnent par leur élégance et leurs fantastiques bonds pour franchir les clôtures.
Carrefour d’Onaisin. C’est là que nous prenons la piste pour aller au Parque de Pinguino Rey voir les manchots royaux. Encore quinze kilomètres d’un mauvais ripio et nous voici devant l’entrée du parc fermé aujourd’hui ! Le gardien nous dépanne en eau et nous indique un abri un peu plus loin sur la route.
En fait, il y a deux abris. L’un récent mais occupé par Rachel et Phrasie, Belge et Française qui voyagent en stop, et un autre, plus… rustique mais qui fait notre affaire. Il dispose de deux couchettes, d’une table et de bancs, et c’est propre !
Nous installons nos matelas et duvets sur les antiques matelas mousse. Cela nous évite de monter la tente et nous sommes à l’abri du vent sinon du froid !
La vue sur la Bahia Inutil est superbe. C’est beau cette Terre de Feu !
Nous prenons un thé avec nos voisines d’un soir, bien sympathiques ce moment !
Nous profitons de la fin de l’après-midi pour nous balader parmi les moutons et les oies sauvages dans ces très beaux paysages ! Laure a même vu un tatou !
Video : De Porvenir au carrefour d’Onaisin
Le Parque Pingüino Rey
En 2010, une colonie de manchots royaux est venue s’installer dans le secteur de la Bahia Inutil. Afin de les protéger, un parc a été créé en 2011. C’est très surprenant de voir cette colonie à cet endroit !
Depuis, cette population a progressivement augmenté avec deux étapes importantes pour cette colonie : la naissance des premiers poussins en 2013 et l’indépendance du premier poussin en 2015.
Le manchot royal est la deuxième plus grande des 18 espèces de manchots du monde. C’est un oiseau migrateur qui se déplace à la recherche de nourriture, de ses aires de reproduction sur les îles subantarctiques aux eaux circumpolaires de l’Antarctique.
L’observation se fait derrière une palissade de bois afin que l’impact de la présence humaine soit le plus faible possible. C’est un peu loin mais le parc a installé des longues-vues.
C’est un magnifique oiseau aux couleurs incroyables !
Video : Parque Pinguino Rey
Du Parque Pingüino Rey à la frontière argentine
Pas bien chaud ce matin. L’abri nous protège du vent mais pas du froid. Qu’importe, vu la température et le vent dehors, nous sommes mieux là !
A 10 h, nous rentrons nos vélos dans les bâtiments du parc et armés de nos appareils photos, nous allons observer les manchots royaux. C’est une chance inouïe de voir ces oiseaux que l’on ne peut rencontrer en général que dans la région de l’Antarctique !
Après une bonne heure à les regarder évoluer avec leur allure presqu’humaine, nous repartons sur nos vélos et reprenons en sens inverse le ripio d’hier jusqu’au carrefour d’Oneisin.
En chemin, nous croisons un couple de cyclovoyageurs et une cyclovoyageuse française qui voyage seule. Au carrefour, nous retrouvons Rachel et Phrasie.
Petit goûter dans l’abri (propre) du carrefour et direction, un éventuel abri situé à 35 km.
Le vent nous pousse, le soleil est arrivé, la pampa nous plaît toujours autant, un vrai bonheur de pédaler !
Voici l’abri ! Mais déception ! Si celui-ci est à peu prêt propre, l’échelle permettant d’accéder à la mezzanine a disparu. Ras le bol de ces c… qui saccagent tout !!!
Nous continuons jusqu’au Paso San Sebastian où se trouve la douane chilienne que nous passerons demain. Ce soir c’est hôtel !
Vidéo : Un abri pour cyclistes
De la frontière argentine à Rio Grande
Passage de la douane chilienne et après 15 km de pédalage avec le vent dans le dos, nous voici de nouveau en Argentine. C’est la jonction avec la ruta 3, nous nous retrouvons alors au bord de l’océan Atlantique.
La route nationale 3 est une route argentine. Elle s’étend depuis la ville de Buenos Aires jusqu’au pont sur le río Lapataia en Terre de Feu, 25 km après Ushuaïa, sur une distance de 3 074 km. Elle est interrompue à un endroit à cause du détroit de Magellan.
On y trouve de la circulation, notamment d’énormes camions plus ou moins dangereux, cela dépend du chauffeur ! Il faut être prudent et ne pas hésiter à prendre le bas-côté au coup de klaxon !!!
Elle déroule son ruban d’asphalte au milieu d’étendues plates où l’on ne trouve que quelques estancias et des forages de gaz naturel.
Et puis, il faut franchir un petit col, ça monte un peu avant de redescendre vers l’océan.
A partir de là, c’est une zone très industrialisée jusqu’à Rio Grande que nous rallions par une belle piste cyclable.
Rio Grande est considérée comme la capitale industrielle de la province argentine de Terre de Feu, Antarctique et Îles de l’Atlantique Sud, Ushuaïa étant la capitale administrative de cette province. En 2010, un recensement comptabilisait environ 66 000 habitants.
Río Grande fut fondée le 14 juillet 1921 quand le gouvernement central argentin fit passer un décret reconnaissant cette localité sous le nom de « Colonie agricole de Río Grande ».
Grâce à une loi en faveur du développement industriel, plusieurs entreprises de production de matériel électronique ont ouvert des usines à Rio Grande.
Nous avons trouvé une ville animée, très vivante. Ce n’est pas une ville désagréable, de plus les gens sont charmants et serviables. On croise des jeunes partout. Il est vrai que nous sommes arrivés à la sortie des écoles.
De plus, on préparait, pour dimanche, la commémoration de la guerre des Malouines en 1982 !
En cherchant un hôtel pour la nuit, un chauffeur de taxi nous indique qu’il y a une « casa de cyclistas » mais c’est trop tard pour nous et trop loin. Pour ceux que cela pourrait intéresser : Joranza Bike, Albelos N°720.
De Rio Grande à Tolhuin
Gris, gris, ce matin. Laure ayant bien étudié le parcours, nous quittons Rio Grande sans soucis.
Il fait 5°C sur le compteur du vélo mais le ressenti doit être plus bas avec le vent car, même s’il n’est pas très violent, il souffle un peu.
La route monte pendant quelques kilomètres puis redescend vers l’océan. C’est plat, la mer est basse avec un estran très important !
Puis nous laissons la côte pour pénétrer dans les terres. La route alterne alors montées et descentes et la circulation se densifie ! Peu de choses sur cette route si ce n’est quelques estancias où l’on élève des bovins si l’on en croit ce que nous voyons dans les champs !
La pampa fait place à des bois peuplés d’arbres à moustaches (lichen) très particuliers.
C’est parmi ces arbres, entre la ruta 3 et les clôtures des estancias que nous installerons un bivouac très sympa.
Derrière la clôture, nous pénétrons dans des bois à l’aspect tout à fait féérique. Des lichens pendent des arbres, des bois secs jonchent le sol, un comte de Perrault dit Laure !
Le soleil (timide) est revenu ce soir mais même avec un peu d’air, il fait 11°C à 17 h. Et de plus, les lumières du soir sont extraordinaires et même la lune se montre en partie !
La « douce » soirée d’hier fait place ce matin à un froid vif : – 4,8 °C sous la tente et -9°C dehors !!! Les vélos sont couverts de givre et la tente de glace !
Nous traînons dans les duvets jusqu’à ce que les premiers rayons du soleil viennent lécher la tente !
La suite de la route est superbe : bordée par ces arbres secs recouverts de lichens d’où émergent d’autres arbres aux couleurs d’automne éclatantes.
La route monte durant 23 km et au sommet, nous apercevons les montagnes enneigées, fin de la Cordillère des Andes et, sans doute à leurs pieds, Ushuaïa.
La boulangerie La Union
A Tolhuin, c’est en cherchant un hébergement que nous tombons sur la boulangerie La Union. Nous en avions déjà entendu parler mais de là à imaginer un tel magasin dans un si petit village…
C’est un lieu incontournable de la région. Lorsque nous avons pénétré dans la boulangerie, nous avons été surpris de la taille de l’endroit et du nombre de personnes qui entraient et sortaient, un ballet permanent !
On peut bien sûr y acheter du pain mais aussi un des innombrables gâteaux, voire du chocolat maison, des sandwichs… L’ambiance est très, très conviviale, le personnel ( nombreux) agréable et il fait bon s’attabler pour un repas après 50 km de vélo.
Emilio Saez, le « patron » a commencé en 1983 en empruntant deux sacs de farine. Quelle réussite mais sans doute quelle somme de travail pour en arriver là !
De plus, Emilio adore les cyclistes et depuis de nombreuses années, leur propose un hébergement dans l’ancienne boulangerie entre sacs de farine et fournitures diverses.
C’est un moment incroyable que nous avons passé ici. Nous y avons retrouvé Emma, la cycliste rencontrée au retour du parc des manchots.
Merci Emilio de ton accueil !
Vidéo : Entre la frontière argentine et Tolhuin
De Tolhuin à Ushuaïa
Petit déjeuner dans la boulangerie La Union avant de prendre la route qui, elle, longe le lago Fagnano sur lequel nous avons des vues magnifiques.
Il fait bon, surprenant pour la région, nous sommes en Terre de Feu, que diable ! Toujours ces arbres « squelettes » agrémentés des touches rouges des hêtres patagoniens.
La route passe son temps à monter et descendre. Il est vrai que nous nous rapprochons d’Ushuaïa et que les montagnes se rappellent à nous.
Le lac Escondido est notre point de chute de ce soir. Laure cherche un coin de bivouac… Finalement, nous montons la tente dans la cour de la gendarmerie !!! Emma arrive et pense aller dormir sur les bords du lac.
Il y a peu de vent ce soir mais il fait un peu frais !
Petit déjeuner au chaud dans les locaux de la gendarmerie et photos des bords du lac avec des couleurs somptueuses.
Dernière ligne droite (si l’on peut dire) aujourd’hui et dernière journée de cette partie de voyage et quelle journée !
Après le passage d’un petit col dans une certaine fraîcheur, nous allons pédaler dans des paysages extraordinaires.
Finis les arbres squelettes à moustaches. Les forêts dispensent des couleurs d’automne fabuleuses, le tout dominé par les dernières montagnes de la Cordillère des Andes !
Et puis, voilà l’entrée d’Ushuaïa. Sur notre gauche, le canal de Beagle et de l’autre côté l’extrême partie chilienne de la Terre de Feu !
Nous arrivons enfin dans le centre ville où nous trouvons un hostal qui nous convient parfaitement.
Pas question de décharger les vélos tout de suite. Nous allons prendre la traditionnelle photo devant le panneau « Fin del Mundo ».
Vidéo : De Tolhuin à Ushuaïa
Nous sommes à Ushuaïa après 74 jours et 2504 km depuis San Carlos de Bariloche.
BRUNO LITWIN
Bravo à vous. C’est superbe, y compris les manchots. Un peu de repos à Ushuaia je suppose, et bonne continuation. Bruno
Gicquel Jean-Pierre
Quel moment passé avec vous ! C’est toujours un plaisir renouvelé, magnifique. Bises et merci à vous. Jean-Pierre et Marie-Noëlle.
claude vermersch
J’en ai la larme a l’œil, voir un peu plus. BRAVO Lionel, BRAVO Laure, merci de ce merveilleux reportage. La chance sourie aux audacieux, il faut juste oser. Je ne peux rien dire de plus. Je vous embrasse.
Votre ami Claude
Patrick Baumy
J’imagine votre bonheur d’avoir réalisé ce rêve de traverser l’Amérique du Sud….Et en plus ce n’est pas fini…d’autres aventures sont à venir.
Bravo à vous deux et encore merci pour la partage de ces magnifiques images.
Patrick
Serge TRENTECUISSE
bonjour à vous 2,
toujours magnifique, donnez le bonjour à nicolas hulot
que de magniques souvenirs
vous étes bons pour des conférences dans les écoles
Marie a gratté l’herbe de vos abords, ça lui a fait la rééducation de sa main
(opérée du canal carpien), elle est dehors toute la journée, heureusement qu’elle ne fait pas de vélo, car je ne la verrais plus, pensées à vous deux et bon courage Marie et Serge
Amandine
Félicitations pour ce chemin déjà parcouru.
En route pour la suite de l’aventure…
Bisous
Fauvain Michel
si on regarde bien en détail vos photos de ces tellement beaux paysages, on peut y voir 2 brins de folie, souvent poussés « chahutés » par les vents, parfois un peu givrés, mais tellement beaux sur leurs vélos …..
s’il vous plait, continuez de nous enchanter